regarder une abeille quand elle pénètre dans la chambre, non pas dans la pièce elle-même, elle reste sous l’encadrement de la fenêtre mais elle est à l’intérieur, face au carreau qu’elle semble inspecter, elle bourdonne, elle vole tranquillement, je la regarde, autrefois je me serais levé brusquement, je l’aurais chassée, mais j’ai appris à aimer les insectes, les observer, ne pas bouger, ne pas sentir de menace, elle ressort évidemment.
j’écoute à la radio le récit du procès de ceux qu’on appelle les papis braqueurs, j’avoue avoir de la sympathie pour eux, leur histoire, des chemins contrariés, ils parlent tous de leurs vies comme de vies ratées, c’est à la fois triste et beau, d’une beauté poétique à la Genet ou plutôt d’une beauté de la simplicité, parce que le bout du chemin est là, ou presque, ils sont tous âgés
mais je n’ai pas de sympathie pour la bague à 4 millions d’euros ni pour le système qui protège Kim Kardashian maintenant, pour les réseaux sociaux qui s’enflamment, est-il normal d’avoir de tels objets, de les étaler et de s’étonner qu’ils inspirent l’envie, l’amertume, le dégoût…
je marche le long de la Loire, les aubépines sont en fleurs comme jamais, sans doute le résultat de l’eau qui a gorgé les sols depuis des mois, je les sens à mesure que j’avance, je sais qu’il ne faut pas se pencher vers les fleurs, l’odeur devient amère lorsqu’elle est trop concentrée, elle doit voler au vent
les tamaris, les spirées, les lilas, tout est en fleurs
j’entends Olivier Guez qui parle de Princeton et de Trump, du deuil d’une Amérique qui n’est plus, je me demande toutefois si elle n’a pas toujours été un mythe et qu’en cela, elle perdure, dans le violence de ses contradictions, la violence de ses réactions, l’infinie beauté de ses paysages, on ne peut l’atteindre qu’en la parcourant, elle est un territoire autant qu’un peuple, peut-être est-il plus simple de la voir pour ce qu’elle est, le monstre qui vient toujours avec la puissance, la même monstruosité qui était là au Vietnam, ailleurs, partout , l’âme est un magma en fusion
#autoportraitsfragmentés
#journéedeprintemps
#notretemps
30 avril 2025