0417-2
Saint-Laurent. Hier soir, je regarde sur Arte le documentaire sur le procès Klaus Barbie. Mai 1987. Je me demandais pourquoi je n’avais aucun souvenir de ce moment, ou simplement des images floues, le nom mais rien de précis. La date pourtant, deux semaines après la mort de mon père, nous avons dû suivre cela à la télé dans la grand salon, fantômes que nous étions
je ne revivrai qu’à la fin mai ou début juin, devant Scapin, la cour de la rue Franklin, mes camarades qui jouent (Laurent surtout), je les envie, mon corps me dit qu’ils vivent, le Rondo Veneziano emplit le soir qui tombe, je suis seul, adolescent, on m’a laissé venir (on=ma mère sans doute), si j’étais parti ce soir-là, je crois que j’aurais vécu
point
ce que je raconte là, c’est d’abord l’histoire de ma sensualité
tous ceux qui parlent de Barbie parlent de ses yeux
aujourd’hui je vois Rubio, je vois Taylor Greene, je vois tous ceux qui collaborent
Steven Miller a le visage d’un sadique, aucune humanité sur ses traits
des visages pourtant, émergent, c’est toujours par les visages que l’histoire se fait: celui de Mohsen Mahdawi, l’étudiant palestinien arrêté
un autre, il n’est pas le premier mais il illumine la perversion du langage, des mots, on le nomme traitre et danger alors qu’il plaide l’entente, l’écoute, ne pas dire un mot plus haut que l’autre, voir les douleurs, entendre les souffrances, placer l’être avant l’idée, revenir à ce que nous sommes
fondamentalement :
des écorchés
la Palestine et son drapeau, un bout de tissu qui souffre mais les drapeaux ne sont rien d’autres que des chiffons qu’on agite dans le vent, ils disent nos peurs, notre besoin de communauté, la solitude
l’anglais sépare loneliness de solitude, l’une est subie, l’autre choisie
mais le français n’a pas ces pôles, tous deux contenus dans le même mot
le drapeau, emblème des solitudes donc, j’adule celui de ce pays qui n’existe pas, il trahit nos trahisons, les promesses non tenues, l’universalité des droits que l’on piétine
allègrement