Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne Peter Hujar 1934-1987 - Antoine Vigne
Comme un fantôme qui vous hante.
Mais bienveillant. Et accueillant. Et magnifique dans son austère indifférence. Il n’y avait pas à lutter contre lui, juste apprendre à le connaître, et réaliser que c’était lui qui changeait, doucement, tranquillement, à un rythme qu’il était parfois impossible de percevoir mais dont le glissement rendait souvent flagrante la permanence de l’être.
Le Vent des plaines, 2018 (extrait)
peut-être as-tu raison de t’en aller
sans rien me dire
Luisance, (extrait)
Le bus partit et Juan le regarda s’éloigner vers l’autoroute dans un brouillard de poussière sèche. Il ouvrit le paquet, y trouvant une petite toile brodée où il reconnut immédiatement le mur frontière, les courbes de niveaux, les routes qui remontaient depuis Nogales et un écrou fracturé qui surplombait le tout et qui pouvait représenter à la fois la libération et la séparation. Ou peut-être les rêves brisés qui constituaient un nouveau départ à partir du moment où on le choisissait. Et, au-dessous de l’ensemble, Carmen avait placé quelques mots tout simples mais où il reconnut une phrase qu’il avait prononcée devant elle : « Les chauves-souris s’envolent vers les étoiles. » Et il se mit à pleurer.
American Dreamer, Éditions courtes et longues, 2019 (extrait)
la plage devant moi, la fin du territoire, la fin du continent, la terre qui devient sable, se fragmente, 
s’effrite, se désagrège puis disparaît sous l’eau, les vagues, l’écume, le mouvement perpétuel
j’ai toujours imaginé le début du monde ainsi :
des vagues qui s’abandonnent, la plage à perte de vue, le lien, le lieu de rencontre entre le liquide 
et le solide, l’échange et le reflux, l’union et la séparation, le soleil, l’astre, le silence, la lumière,
la non-conscience
l’être qui nait ne sait rien, il est attente, contemplation
désagrège, (extrait)
– J’ai dû changer, Abuelo.
– On ne change jamais tant que ça.
– Ça fait vingt ans. J’étais un enfant.
– Vingt ans, déjà ?
– Je suis désolé, Abuelo. »
Le grand-père posa sa main sur celle de son petit-fils.
« Je sais que tu vis loin. »
Il s’arrêta encore.
« Mais tu as eu raison de revenir. »
L’un et l’autre se turent pendant quelques instants.
« Tu veux un verre de mezcal ?
– À cette heure-ci ?
– On a bien le droit, une fois tous les vingt ans… »
American Dreamer, Éditions courtes et longues, 2019 (extrait)
« Cette histoire n’est rien. Un moment volé au temps. Quelques heures entre l’Atlantique et Détroit, suspendues dans la chaleur de l’été au-dessus de l’asphalte désagrégé des rues. Le rêve d’une ville en décadence, la vitrine de nos échecs et de nos faillites, le fossé dans lequel on ne cesse de jeter les corps dépecés des exclus et des abandonnés. Le monde tel qu’il est. Un chaos perpétuellement renouvelé que nous cherchons sans cesse à rationaliser pour lui donner un sens et satisfaire notre fantasme d’équilibre. Et au creux duquel nous inventons nos vies. »
Tout s’écoule, Éditions Bartillat, 2023 (extrait)
une photo sur Instagram,
ton fil qui s’évapore dans les montagnes fumeuses de Caroline du Nord
pourquoi l’as-tu postée au monde plutôt que de me la transmettre, à moi ?
quel égoïsme dans l’amour, quel égocentrisme (le mien)…
j’annule la possibilité de ton existence aux autres


te laisser reprendre ton souffle,
ne pas t’effrayer,
peut-être es-tu déjà mort à notre amour – quel droit ai-je de prononcer ce mot dans le doute –, à ce désir que tu inventes pour moi, je me laisse porter par le mirage
Luisance, (extrait)
Encore plongé dans Guibert - Antoine Vigne

Encore plongé dans Guibert auquel je m’identifie momentanément. C’est toujours comme cela quand on lit un auteur qu’on aime. Peu à peu émergent des connivences, une proximité. J’ai fini de relire À l’ami, j’ai écouté un entretien de Christine Guibert, je regarde ses photos, je fais des recherches sur ses livres, je n’avais pas pris conscience qu’il y en avait tant, écrits sur une période courte, 15 ans à peine, les titres défilent, les essais, les romans, plusieurs ont tout de même été publiés de manière posthume mais cela ne change rien au temps qu’il lui a fallu pour produire cette somme. Évidemment, chaque fois, la même perplexité en sentant mes neurones se mettre à me comparer à lui, à son travail. Sur le site Recyclivre que je ne connaissais pas jusqu’ici et qui propose une économie solidaire et environnementale du livre d’occasion, je passe en revue les titres, avec l’envie de tout acheter, de me constituer la bibliothèque parfaite du lecteur guibertien, sachant qu’il faudra que je revienne à ses Parents, à l’Écriture photographique. Je pense à la photo que Jean a sur son mur, Les Escaliers, Eugene, Villa Médicis, qui date de 1988, accrochée le long de la poutre médiane, Guibert venait de mourrir lorsqu’il l’a acquise, lorsque nous étions ensemble, des années 1990 qui semblent à la fois lointaines et toutes proches, la lumière d’été sur la table où nous prenions le petit-déjeuner, les émissions de France Inter, cet été-là Laurence Boccolini avait concocté des matinées spéciales Eurovision, c’était joyeux, pétillant, ça coïncidait très exactement avec le point où se trouvait notre relation. Jean aimait Guibert plus que moi, il m’initiait, j’avais dû en lire trois ou quatre à l’époque mais la proximité de l’épidémie qui tuait encore faisait qu’il était difficile de ne pas éprouver de crainte en ingérant les descriptions de ses séjours à Claude Bernard, des tests qui ressemblaient à ceux qui m’avaient terrorisés lorsque je descendais à la station Saint-Jacques avec Gilles alors que nous n’avions pas de véritable raison de nous inquiéter mais comment aurait-il été possible de ne pas participer à l’angoisse du moment, nous étions juste à ce point où les traitements allaient faire basculer la perception de la maladie. Et, en relisant Guibert, Jarman, Haring, Bourdin, Patti Smith, je retrouve, mais atténuées, non pas la terreur, il est impossible de s’y replonger maintenant que la peur a disparu, mais les effluves d’un temps où se chevauchent les platanes sur les boulevards de Paris, les après-midis au Luxembourg entre les cours à l’institut d’histoire de l’art, mes allées-et-venues sur les quais à la poursuite de rencontres et du temps dont je ne savais pas quoi faire, la vision des péniches qui passent devant le Jardin des plantes, l’escalier sans fin qui mène à l’appartement de Jean, mes doutes sur l’avenir que je ravalais, incapable que j’étais de les regarder en face, de les interroger pour prendre des décisions, non, je suivais le fleuve et je le suivrais encore pendant des années, des décennies, avant de sentir la berge s’affermir. Me pas dans ceux de Guibert mais sans son assurance cynique, un regard froid sur le monde. Je ne savais pas lâcher le cocon.

#art #hervéguibert #homosexualité #photographie
28 mai 2025
J’ai fini le livre de Jean, le récit de Pierre … - Antoine Vigne
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J’ai fini le livre de Jean, le récit de Pierre Apraxine, l’histoire d’une vie, les mots d’une rencontre, Pierre n’aurait pas écrit sans Jean et, pour ceux qui connaissent Jean comme moi, il y a cette double voix, l’extrême attention aux mots de celui qui s’efface, la pudeur des deux, celui qui livre sa vie, celui qui n’ose écrire que lorsque c’est pour un autre, les deux hantés par la littérature, par des destins contrariés, par des réponses qui manquent, par l’homosexualité douloureuse (même quand elle est rédemptrice), par le temps qu’il faut combattre. Et puis la capacité de penser l’image, d’en vivre les possibilités comme une certitude qui permet d’énoncer des narrations comme si elles étaient des vérités scientifiques tout en sachant qu’elles sont aussi des chimères, des raisonnements qu’on peut retourner lorsqu’on leur enlève leur aspect subjectif. Derrière ce regard en duo, il y a la conscience de l’incommunicabilité des choses, de la solitude, des joies que l’amitié autorise à essayer de partager même si c’est une illusion. Le texte est une histoire de la photographie, une histoire de New York à une certaine époque, une histoire du sida et ses ravages, une histoire de la Russie qui s’effondre, une histoire du XXe siècle, une histoire du pouvoir de la littérature, une histoire de la fin des territoires inconnus, des grandes explorations, une histoire à la fois ouverte et refermée. C’est un roman autant qu’une lettre à tous ceux que l’un et l’autre n’auront pas eu le temps de rencontrer. La photographie est là aussi, évidemment, elle comble les vides, elle donne chair à l’aventure, une raison de poursuivre la narration, une raison de continuer à espérer, une raison de vivre. Mais, comme le texte, elle reste mystérieuse. Silencieuse.

#art #editionscourtesetlongues #jeanpoderos #limageavenir #pierreapraxine
24 décembre 2024
Encore plongé dans Guibert - Antoine Vigne

Encore plongé dans Guibert auquel je m’identifie momentanément. C’est toujours comme cela quand on lit un auteur qu’on aime. Peu à peu émergent des connivences, une proximité. J’ai fini de relire À l’ami, j’ai écouté un entretien de Christine Guibert, je regarde ses photos, je fais des recherches sur ses livres, je n’avais pas pris conscience qu’il y en avait tant, écrits sur une période courte, 15 ans à peine, les titres défilent, les essais, les romans, plusieurs ont tout de même été publiés de manière posthume mais cela ne change rien au temps qu’il lui a fallu pour produire cette somme. Évidemment, chaque fois, la même perplexité en sentant mes neurones se mettre à me comparer à lui, à son travail. Sur le site Recyclivre que je ne connaissais pas jusqu’ici et qui propose une économie solidaire et environnementale du livre d’occasion, je passe en revue les titres, avec l’envie de tout acheter, de me constituer la bibliothèque parfaite du lecteur guibertien, sachant qu’il faudra que je revienne à ses Parents, à l’Écriture photographique. Je pense à la photo que Jean a sur son mur, Les Escaliers, Eugene, Villa Médicis, qui date de 1988, accrochée le long de la poutre médiane, Guibert venait de mourrir lorsqu’il l’a acquise, lorsque nous étions ensemble, des années 1990 qui semblent à la fois lointaines et toutes proches, la lumière d’été sur la table où nous prenions le petit-déjeuner, les émissions de France Inter, cet été-là Laurence Boccolini avait concocté des matinées spéciales Eurovision, c’était joyeux, pétillant, ça coïncidait très exactement avec le point où se trouvait notre relation. Jean aimait Guibert plus que moi, il m’initiait, j’avais dû en lire trois ou quatre à l’époque mais la proximité de l’épidémie qui tuait encore faisait qu’il était difficile de ne pas éprouver de crainte en ingérant les descriptions de ses séjours à Claude Bernard, des tests qui ressemblaient à ceux qui m’avaient terrorisés lorsque je descendais à la station Saint-Jacques avec Gilles alors que nous n’avions pas de véritable raison de nous inquiéter mais comment aurait-il été possible de ne pas participer à l’angoisse du moment, nous étions juste à ce point où les traitements allaient faire basculer la perception de la maladie. Et, en relisant Guibert, Jarman, Haring, Bourdin, Patti Smith, je retrouve, mais atténuées, non pas la terreur, il est impossible de s’y replonger maintenant que la peur a disparu, mais les effluves d’un temps où se chevauchent les platanes sur les boulevards de Paris, les après-midis au Luxembourg entre les cours à l’institut d’histoire de l’art, mes allées-et-venues sur les quais à la poursuite de rencontres et du temps dont je ne savais pas quoi faire, la vision des péniches qui passent devant le Jardin des plantes, l’escalier sans fin qui mène à l’appartement de Jean, mes doutes sur l’avenir que je ravalais, incapable que j’étais de les regarder en face, de les interroger pour prendre des décisions, non, je suivais le fleuve et je le suivrais encore pendant des années, des décennies, avant de sentir la berge s’affermir. Me pas dans ceux de Guibert mais sans son assurance cynique, un regard froid sur le monde. Je ne savais pas lâcher le cocon.

#art #hervéguibert #homosexualité #photographie
28 mai 2025
J’ai fini le livre de Jean, le récit de Pierre … - Antoine Vigne
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J’ai fini le livre de Jean, le récit de Pierre Apraxine, l’histoire d’une vie, les mots d’une rencontre, Pierre n’aurait pas écrit sans Jean et, pour ceux qui connaissent Jean comme moi, il y a cette double voix, l’extrême attention aux mots de celui qui s’efface, la pudeur des deux, celui qui livre sa vie, celui qui n’ose écrire que lorsque c’est pour un autre, les deux hantés par la littérature, par des destins contrariés, par des réponses qui manquent, par l’homosexualité douloureuse (même quand elle est rédemptrice), par le temps qu’il faut combattre. Et puis la capacité de penser l’image, d’en vivre les possibilités comme une certitude qui permet d’énoncer des narrations comme si elles étaient des vérités scientifiques tout en sachant qu’elles sont aussi des chimères, des raisonnements qu’on peut retourner lorsqu’on leur enlève leur aspect subjectif. Derrière ce regard en duo, il y a la conscience de l’incommunicabilité des choses, de la solitude, des joies que l’amitié autorise à essayer de partager même si c’est une illusion. Le texte est une histoire de la photographie, une histoire de New York à une certaine époque, une histoire du sida et ses ravages, une histoire de la Russie qui s’effondre, une histoire du XXe siècle, une histoire du pouvoir de la littérature, une histoire de la fin des territoires inconnus, des grandes explorations, une histoire à la fois ouverte et refermée. C’est un roman autant qu’une lettre à tous ceux que l’un et l’autre n’auront pas eu le temps de rencontrer. La photographie est là aussi, évidemment, elle comble les vides, elle donne chair à l’aventure, une raison de poursuivre la narration, une raison de continuer à espérer, une raison de vivre. Mais, comme le texte, elle reste mystérieuse. Silencieuse.

#art #editionscourtesetlongues #jeanpoderos #limageavenir #pierreapraxine
24 décembre 2024