Vendredi soir, la pièce de Capdevielle au T2G de Gennevilliers. Caligula. Le mots de Camus, la densité, deux heures et demi de chute vertigineuse, le décor en forme de promontoire sur des rochers face à la mer, le vide derrière, devant, dans le couloir, bouche de béton en jaune comme l’émergence de la modernité, le costume, le maillot de bain, l’attente des tables de DJs qui troublent le rapport au temps mais ce n’est pas grave, évidemment, le mouvement d’ensemble est un mouvement d’abolition (des limites, des peurs, de l’autre, du sens… aller toujours pour loin, le réel s’oppose à la pensée qui s’enivre de son accélération sans fin). Étrange sentiment à la sortie, la submersion dans un trop plein. J’aime le chevauchement, le texte et le monde de Capdevielle, le travestissement qui ronge le corps plus qu’il ne l’habille, le surgissement du camp, du queer, des tables de DJs, de l’italien comme langue qui brouille le texte puis les hurlements derrière la butte – même le langage se travestit. Le temps s’allonge, épuise, on veut la mort, on veut la fin de ce spectacle qui n’a plus de sens. Le texte s’emballe en fait, il ne sait plus lâcher, «je suis encore vivant» n’est pas qu’une prophétie, l’actualité qui ronge le week-end lui donne raison, toutes les violences nourries de la misère rejoignent le fou de l’Empire. Pleurer n’a plus de sens.
Dans les cahiers Camus, le “dépasser la vie banale”, le lien à Grenier, Cheskov, Nietzsche. L’illusion tient à la linéarité. Le dépassement peut se penser comme des explosions solaires qui ne durent pas. Une succession d’états qui se répètent et se surprennent toujours de leur violence.
Aussi, la rencontre de Virginie et Marguerite quelques minutes avant le spectacle, le partage inattendu heureux.
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