Mes tailles dans les bois portent leurs fruits, des itinéraires se lisent, des allées s’ouvrent qui ne sont plus seulement des sentes que refermaient chaque fois les ronces, elles se déroulent comme des tapis de lierre. Je redresse des arbres tombés, je coupe des branches. Je découvre avec excitation l’ombre créée par les saules que j’ai taillés en trogne sous la ligne électrique, ce qui me permet aussi de dégager enfin ma mare, d’en retirer des branches en décomposition que j’utilise pour ébaucher une berge, J’écrase aussi la renouée du Japon contre laquelle je me bats depuis des années, combat sisyphéen puisque son rhizome lui donnera toujours la possibilité de revenir mais je gagne du terrain, je redonne des forces à la végétation d’origine. Grande excitation, je me sens capable de passer des heures à ne faire que cela, sans penser. Alors que je ne réussissais pas à travailler ainsi manuellement sans sentir le poids des obsessions, de l’esprit qui ne s’arrête pas et donc ne voit pas, reste enfermé dans le cycle sans fin des projections mentales, je me trouve enfin capable d’avancer uniquement concentré sur ce que je fais, dans le silence d’un esprit qui a appris à lâcher les habitudes de formulation permanente.

Échangé avec Danny aussi.

Je continue mes lectures de De Duve et des autres.