La journée folle d’hier, commencée dans la joie des résultats en Géorgie, et la difficulté, comme toujours de m’arracher aux articles qui se succèdent sur Internet, en passant d’une plateforme à l’autre, en cherchant sans cesse des justifications à mes émotions. Puis, vers 14h30, le message de JonCarlo qui nous met devant la télévision et les images qui défilent, la surprise qui n’en est pas vraiment une parce que nous avons attendu ce moment, parce que toute la trajectoire de la présidence Trump nous y amenait, mais la puissance assommante de la réalité nous assaille quand même pendant des heures à la vue du Capitole envahi et tous les symboles de la République bafouée. C’était comme une mauvaise série, il était difficile de ne pas sentir que nos esprits trop accoutumés à l’adrénaline quotidienne se repaissaient de ce spectacle comme s’il avait été l’aboutissement nécessaire de nos angoisses, notre besoin d’avoir raison, de montrer que, finalement, oui, la présidence Trump conduirait bien à tout cela. Mais au bout du compte, c’était tout de même le chaos, la confusion et, finalement, la colère de voir que la police ne faisait rien, qu’elle se laissait submerger comme jamais elle ne s’était laissée submerger par les mouvements de Black Lives Matters pendant l’été, comme une coincidence triste, évidente. Le jour d’après, il ne reste que des ruines fumantes que ne peuvent cacher les rayons du soleil d’hiver ni les discours des Républicains qui tentent à tout prix de s’éloigner du navire qui sombre. Des cris s’élèvent déjà, dans les milieux bien rodés de la désinformation, pour dire que ces émeutes n’étaient pas le fait des patriotes mais de l’ultra gauche déguisée en partisans de Trump parce qu’il faut bien continuer, toujours, à masquer la réalité, à l’envelopper d’un tel voile, d’une telle boue, que plus personne n’y voit plus rien. Mais les faits sont là, la réalité est là. La démocratie américaine est sur le sol, elle est encore vivante, elle tremble comme une animal blessé face à l’ombre du prédateur. Et l’on ne peut qu’attendre, espérer. On veut se battre sans savoir où commencer. Le monde qui vient est trop jeune et trop lent et le monstre est là, partout.