En lisant (saint) Augustin, hier :
comment puis-je en le lisant à la fois percevoir ce qui m’a construit, le jeune, la prière, la contemplation,
et en rejeter tout ce qui m’a abîmé, les injonctions, le rejet de la chair, la haine de la sensualité
pourquoi cette incapacité chez lui d’accepter qu’on ne contrôle pas tout, ni ses désirs, ni ses pensées, pourquoi penser que cette incapacité, plutôt qu’être une richesse, le siège de l’élan, de l’intuition, des émotions, du rapport au monde, est un dysfonctionnement qu’il faut mater? pourquoi ce refus de l’être?
Il entraine à sa suite des siècles d’abus commis par l’Eglise et une part immense de la tradition chrétienne envers des générations d’êtres humains auxquels on dit : ne vivez pas ce que vous êtes. Exactement comme on bandait les pieds des femmes à certaines époques de la civilisation chinoise: cultures de mort donc qui se prétendent être la vie. Renversement de la réalité, celui qui s’en extrait dit qu’il est la réalité. Chatoiement du mensonge. Le même dispositif est à l’oeuvre aujourd’hui dans les tendances réactionnaires de nos pays.
pourquoi avoir laissé un homme qui apparemment n’aimait pas sa sexualité ni sa vie nous expliquer qu’il fallait que nous abandonnions tous nos vies, nos corps?
ne pourrions-nous pas l’enterrer une bonne fois pour toutes… laisser sa voix mourir dans le désert? choisir ceux qui aiment plutôt que ceux qui disent aimer mais se détournent du seul amour qui existe, du seul désir qui compte.
choisir Pélage contre Augustin
(Retourne toi, Augustin, Antoine Vigne, 2025)