Au détour de recherches, je lis sur Mauriac, puis sur Jouhandeau.
Je reconnais chez eux les tortures de la sensualité qui ne peut pas se libérer du carcan où elle a été enfermée, soumise à une vérité dominatrice, totalitaire, aux préceptes, à l’idée de Dieu, engoncée dans le vocabulaire de la faute, de la pureté, et qui s’invente, dans le mysticisme, une voie de salut. De survie serait sans doute plus juste. Elle cherche l’incarnation dans les entre-deux, le soleil perçant aveuglément dans les nuages, c’est un vol qui ne trouve jamais le grand bleu mais des éblouissements rassurants, réconfortants après les nuits d’orage, après les grêles intenses, le désir et l’amour ne les lâchent jamais.
Cette citation de Jouhandeau :
“Je ne devrais plus penser qu’à Dieu et quelqu’un me dispute à Lui, comme si l’Océan sortait de son lit pour l’amour d’un rocher contre lequel il ne saurait que se briser ou comme si mon regard oubliait le Ciel pour suivre un nuage”.
C’est déchirant.
et puis cette phrase aussi:
“On ne peut adorer l’Éternel sans laisser d’être sensible aux idoles qu’il est permis de toucher.”
D’autres passages fabuleux dans la correspondance entre Leiris et Jouhandeau qui ont été amants
Leiris dans une lettre à Jouhandeau en 1926:
“le silence – image de l’absolu – pouvait seul donner une idée de la façon dont m’avaient frappé tes paroles. Je n’ai pas cru devoir, par des vocables humains, essayer d’exprimer mon émotion, profonde comme un filet de sang dans la blancheur d’un os, liquide vivant serré entre les ais rigides de l’éternel. […] Notre amitié est située hors des lieux et des temps, sur la plage immense de l’absolu. Il y a des épaves, des albatros, des ossements de noyés. Il y a des trésors sortis des galions défoncés. Il y a des galets durs et polis comme des crânes, des vagues douces et monstrueuses”.
La poésie les sauve sans les racheter.
Impossible de ne pas penser aux ravages de la religion aujourd’hui encore. Derrière les atours de ce que réussit à extirper la souffrance à l’être.